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À propos du FN

samedi 13 mai 2017, par Club Politique Bastille

« Alléluia, le fascisme a été vaincu ! »

Donc comme prévu, Macron a été élu. La bête immonde était tellement nulle, incapable d’arguments sur son programme xénophobe souverainiste aberrant, qu’elle a probablement perdu plusieurs centaines de milliers d’électeurs lors du débat.

N’empêche, le « fascisme » a été terrassé. Pour cinq ans. Comme il l’avait été en 2002 mais cette fois avec un score électoral jamais atteint : plus de 10 millions d’électeurs.

Les partis de « droite et de gauche » ont, peu ou prou, mené la même politique réactionnaire. Le petit paysan a dû choisir entre le suicide et la faillite, le petit commerçant a dû fermer boutique dans un centre ville déserté au profit des grandes surfaces, dans des zones où les services publics ont disparus ; la désindustrialisation s’est poursuivie jetant sur le carreau des millions de nouveaux chômeurs. L’armée des précaires s’est encore élargie, et la pauvreté, oui la pauvreté a atteint les 9 millions ! Soient des ménages où on ne mange plus que des pâtes, jamais de viande, où on ne survit que grâce aux Restos du Cœur... Des millions de femmes et d’hommes sont devenus des réfugiés sociaux dans leur propre pays, évidemment sensibles aux arguments xénophobes, racistes sûr le thème, on en fait plus pour eux que pour nous…

Nous ? Ceux qui ne peuvent se faire soigner les dents, désocialisés, seuls, plongés dans les misères matérielles et psychologiques, abimés par les programmes débiles de la télévision…

Certaines régions frappées plus fortement ressemblent aux paysages sociaux du 19ème siècle.

Et ceux-là, tous ceux-là forment le terreau désespéré du Front National.

Donc, le « fascisme » a été contenu et Macron va - tenter - de pratiquer une politique de la terre brûlée contre les salariés, ce qui va créer les conditions d’un nouveau développement de ce que Enzo Traverso nomme justement le « post-fascisme » en différenciation du fascisme des années 20-30.
Donc, le Front National dans cette forme ou dans un nouvel uniforme va encore prospérer.

Malgré « l’antifascisme » de tous ceux qui de la droite à Mediapart, des LR au PS sans oublier ceux, sans mémoire ni réflexion, à la gauche de la gauche qui ont contribué à faire élire Macron, sur le thème : c’est moins pire…
Des millions se sont abstenus, ont voté blanc… Des millions ont refusé de combattre la conséquence en soutenant la cause. Le libéralisme qui fait le lit du FN.
Pour Macron, la politique est limpide.
Selon lui, entre les Républicains et le Front National, il n’y a plus rien. Certes, ceux qui votent pour lui sans partager son programme, « ont leurs idées », mais sont rassemblés sous la même bannière : la République. Entre les souverainistes et les mondialistes, il n’y a plus rien, affirme Marine Le Pen.
D’ailleurs, ils ne sont pas seuls à simplifier le champ de politique.
Jean-Luc Mélenchon qui a refusé de se rallier à Macron, s’exprime dorénavant en mobilisant verbalement les « gens » contre les « riches » et les « haineux »… (lire sur le terrain)
Pour tous ceux-là, il n’y a plus de classes sociales.

Un mot s’agissant de l’antifascisme. On a cité Trotsky. Diantre ! Rappelons les faits : Trotsky a mené campagne avant 1933, en Allemagne, et pas seulement, mais centralement en Allemagne pour l’unité du PCA et du SPD contre les nazis.

Les deux grands partis de classe, divisés, opposés avec des centaines de milliers de militants, rassemblant des millions d’électeurs contre le parti nazi qui, SA et SS déjà armés, attaquaient quotidiennement les organisations ouvrières provoquant des centaines de morts, attisant les haines antisémites !!! C’est dans cette situation de guerre civile que s’est mené le combat pour le Front Unique Ouvrier alors que l’IC stalinienne passait son temps à dénoncer le SPD, ses dirigeants, sa politique comme « social-fasciste » ! Axant son combat sur une stratégie mortifère : le fascisme n’est qu’une péripétie sans avenir. Après Hitler, Thalmann !

Trotsky n’appelle pas à voter Bruning ou Hinderburg qui cependant longtemps s’opposent à Hitler. Il sait que ce « diable » au bout du bout s’alliera avec Hitler. Combattre le fascisme c’est constituer un bloc prolétarien contre le nazisme pour gagner la petite bourgeoisie radicalisée, créer des milices ouvrières unies etc…
Telle est la stratégie pour laquelle Trotsky combat. Il est seul mais il a totalement raison.

Sommes-nous en France, peu ou prou dans cette situation ?

À la veille de la victoire du fascisme ? Les hordes de beaufs avinés, racistes, xénophobes sont-elles dans la rue ? Évidemment non.

D’ailleurs, il n’y a pas, il n’y a jamais eu, même à l’époque de l’OAS en France, de danger fasciste. Le fascisme n’est pas passé, car il n’a jamais existé ! Ce qui n’a pas empêché les militants ouvriers de combattre les groupements fascisants…

Le Front National peut peut-être enfanter le fascisme si la situation économique, sociale, politique, d’un coup se modifie radicalement. Ainsi un nouveau coup de torchon financier planétaire implosant la société, une intervention militaire américaine en Syrie ou en Corée du Nord déstabilisent tous les pays. Mais répétons-le, nous ne sommes pas dans cette situation. Marine Le Pen n’a jamais été en mesure de l’emporter. Les affirmations contraires visaient à effrayer, paniquer… Ajoutons que lorsqu’il y a un danger fasciste, les élections ne suffisent pas. Les véritables organisations fascistes, par exemple Aube Dorée en Grèce, assassinent, mènent une action extra-parlementaire.

En Pologne, en Hongrie, Bulgarie, dans l’est de l’Allemagne, en Hollande, la politique néo-libérale de l’Union Européenne a provoqué l’apparition de groupes, de partis, antisémites, nationalistes, racistes et surtout islamophobes…

Le djihadisme terroriste a également permis de mobiliser une fraction significative de la petite bourgeoisie et des millions de déclassés. Il n’y a pas de définition unique, intangible du fascisme. Mais n’oublions pas qu’en Italie, en Allemagne, la montée du fascisme s’est caractérisé par la militarisation du lumpenprolétariat. C’est-à-dire la destruction physique du mouvement ouvrier et démocratique !

Marine Le Pen durant sa campagne a au contraire tout fait pour abandonner les fondamentaux extrémistes du FN pour se « présidentialiser », exclure les antisémites et les négationnistes. On ne peut donc comparer Paris avec Budapest ou Varsovie. Et puis il y a le sillon de l’histoire. Ainsi, il est dorénavant difficile d’imaginer en Allemagne la montée d’une organisation fasciste sérieuse. Le peuple tout entier s’insurgerait en souvenir de l’hitlérisme. En France, la riposte du 6 février 34 a brisé les reins aux organisations qui prétendent « copier » les modèles allemands et italiens. Même sous l’Occupation, à part les petits groupes autour de Doriot et Déat, l’extrême droite n’est jamais parvenu à muter en organisation fasciste digne de ce nom. Discuter de ces problèmes implique un minimum de connaissances. Ce qui est étonnant, c’est qu’à la gauche de la gauche (pas parmi les Insoumis), des camarades ont paniqué, oubliant en 2002 : la bourgeoisie était parvenue à susciter un mouvement populaire et jeune contre Le Pen mais cette fois, l’union nationale n’a pas marché. La volonté de Macron, c’est à marche forcé, d’imposer la purge libérale. Nul ne sait ce que sera la réponse des salariés, de la jeunesse, mais assurément, pour débattre d’une stratégie il faut essayer d’analyser calmement la situation. À ce propos, il faut revenir sur l’absolue nécessité de combattre pour les États-Unis démocratiques de l’Europe seule réponse sérieuse contre le nationalisme et le souverainisme.

Les plus lucides, les plus résolus se sont abstenus ou ont voté blanc. On les retrouvera à l’avant-garde des combats politiques.

Le pays sort d’une des plus longues - et pugnace - bataille sociale contre la loi El Khomri, cette mobilisation encore contrôlée par les appareils a échoué mais a tué le gouvernement Valls et François Hollande. Aujourd’hui il y a un danger majeur : le néo-libéralisme politique, pas le fascisme.

Ce qui précède ne signifie évidemment pas qu’il ne faut pas combattre le FN. Il faut sonner - efficacement - la charge mais sur un plan de classe, en proposant des solutions politiques, un espoir. Ce n’est pas ce qui s’est passé. Et malgré le tintamarre unanime des médias, les appels paniqués à voter Macron, des millions ont refusé. Ni Macron, ni Le Pen.

Reste l’essentiel, ceux qui ont voté Macron et ceux qui ont choisi une autre manière de s’opposer au capitalisme vont se retrouver dans l’action. Pas de guerres de religions. Pas d’anathème. Tous ensemble, Union contre Macron qui n’est pas un social-libéral, mais un authentique libéral.

Nous reviendrons après les législatives sur ces problèmes. Un dernier rappel politique.

Sans nourrir d’illusions électorales, il était possible de renverser la table, d’être présent au second tour de la présidentielle ! D’affronter Macron ou Marine Le Pen.

La campagne de Mélenchon a fait baisser de plusieurs points le FN. Il a manqué quelques centaines de milliers de voix pour qu’il soit au second tour. Indépendamment de sa politique réformiste-patriotique-tricolorisée, l’affrontement contre Macron ou Marine Le Pen eut été, en soit, un événement politique majeur en France et bien sûr à l’étranger. Ce sont les exploités, les opprimés, la jeunesse, qui se sont rassemblés derrière Mélechon, comme… en 1981 derrière Mitterrand qui alors était beaucoup plus à gauche que le « caudillo » franc-maçon.(2)

Si Mélenchon avait fait campagne pour l’unité avec Hamon contre le néo-libéralisme d’Hollande et Macron, la victoire était assurée ! Hamon aurait probablement cédé, mais aurait-il refusé que Mélenchon aurait rassemblé, enthousiasmé. Il ne l’a pas voulu. Une telle politique d’unité aurait bousculé, peut-être battu Macron. Et Mélenchon s’apprête à recommencer la même politique aux… législatives…

Il faudra y revenir.

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