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CHILI / Lettre ouverte à Gabriel BORIC et à son gouvernement
mardi 25 octobre 2022, par
CHILI / Lettre ouverte à Gabriel BORIC et à son gouvernement
Réseau International de soutien aux prisonnier.e.s politiques au Chili © RIAPPECH
Lettre ouverte à Gabriel BORIC et à son gouvernement
Monsieur le Président,
Ce 18 octobre marque le troisième anniversaire du soulèvement social et nous constatons avec déception que, dans les prisons chiliennes, il y a encore des prisonnier.e.s politiques issus de la révolte, sans compter les prisonniers politiques Mapuche, les prisonniers politiques postérieurs au soulèvement et les prisonniers politiques historiques.
Si nous réfléchissons un peu, nous observons qu’entre les promesses de la campagne, votre premier discours de président élu et ce qui s’est passé dans la réalité, un énorme fossé s’est progressivement creusé entre la théorie et la pratique du gouvernement en matière de droits humains.
La réponse tardive de septembre 2022, par l’intermédiaire de M. Fernando Rojas, chef du département de la gestion citoyenne, à notre lettre du 24 mars de la même année, élude nos demandes fondamentales, ne mentionnant que la volonté d’accorder des réparations aux victimes, ignorant la demande de libération des prisonniers de la révolte.
Lors de votre première intervention publique devant le Congrès le 1er juin 2022, notamment en ce qui concerne les droits humains, vous avez déclaré : "pendant le soulèvement social, nous avons connu la pire crise des droits humains de ces 30 dernières années".
Il est de notoriété publique que le pouvoir judiciaire à tous les niveaux - tribunaux et Cour suprême - (à l’exception de quelques juges), le Ministère Public et le Conseil de défense de l’État ont été complices de l’emprisonnement de la plupart des prisonnier.e.s de la révolte, sur la base de fausses accusations et de faux témoignages issus des montages connus des carabiniers et de la PDI.
Aujourd’hui, sept mois après votre entrée en fonction comme Président de la République, et malgré les pouvoirs exclusifs que vous confère votre rang de Président, nous constatons qu’aucune mesure de libération des prisonnier.e.s politiques n’est devenue une réalité, et que les violeurs des droits humains restent libres, impunis, poursuivant leur travail comme si rien ne s’était passé.
La question se pose alors :
Quelles sont vos craintes pour ne pas remplacer les généraux et les officiers corrompus qui sont responsables de violations des droits humains ?
Pourquoi les carabiniers et les agents de la PDI, auteurs directs des violations des droits humains, n’ont-ils pas encore été sanctionnés ?
Pourquoi votre gouvernement maintient-il les poursuites contre les jeunes de la révolte sociale, et pourquoi les avocats du ministère de l’Intérieur, nommés sous le gouvernement de Piñera, sont-ils toujours les mêmes ?
Pourquoi votre gouvernement n’a-t-il pas pris les mesures nécessaires pour empêcher la justice chilienne de continuer à sévir contre les personnes impliquées dans l’explosion sociale ?
Nous aimerions évoquer votre discours, lors de la 77e session de l’Assemblée générale des Nations unies, dans lequel vous avez rappelé au monde entier que "nous avons assisté à une répression incontrôlée qui s’est soldée par des morts, des blessés et plus de 400 personnes souffrant de traumatismes oculaires en raison des actions de l’État, ce qui constitue, du point de vue de notre gouvernement et des organisations internationales de défense des droits humains, une grave violation des droits humains qui doit être et sera réparée".
Monsieur le Président, il ne suffit pas de mettre en place une Commission de réparation intégrale pour prendre en charge les victimes de la terreur d’État, y compris les prisonnier.e.s de la révolte, si la vérité n’est pas établie et si les coupables ne sont pas punis.
À la même occasion, vous avez demandé instamment : "de continuer à œuvrer pour contribuer à la libération des prisonniers politiques au Nicaragua, et de veiller à ce que, partout dans le monde, le fait d’avoir des idées différentes de celles du gouvernement en place ne conduise pas à la persécution ou à la violation des droits humains".
Peut-on alors en déduire que vous considérez - comme la droite - les prisonniers de la révolte comme des criminels, et que la persécution et la violation de leurs droits humains sont justifiées ?
Monsieur le Président, libérez d’abord les prisonniers politiques dans votre propre pays et occupez-vous ensuite des prisonniers politiques dans les autres pays. Votre discours n’est pas basé sur la réalité du pays. Si nous prenons en compte les données de la Gendarmeríe du Chili (également complice de ce qui s’est passé et responsable de multiples mauvais traitements), lorsque vous avez pris vos fonctions de président, il y avait 211 personnes emprisonnées pour des causes liées aux manifestations qui ont eu lieu entre le 18 octobre 2019 et le 30 mars 2021. Selon d’autres sources, les chiffres sont beaucoup plus élevés.
Enfin, sachant que le projet de loi d’amnistie, en attente depuis plus de deux ans au Congrès, a échoué, le seul espoir de liberté pour les personnes injustement condamnées et pour celles qui attendent toujours leur procès, c’est que vous fassiez usage des pouvoirs qui sont les vôtres :
Accorder une Grâce présidentielle aux prisonnier.e.s de la révolte qui ont déjà été condamné.e.s,
Retirer toutes les actions en justice intentées par le gouvernement de Piñera, que votre administration a maintenues.
Commission Communications Riappech
17 octobre 2022
Contact : riappech@gmail.com
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